Le Capital, Costa-Gavras, 2012

Publié le par Le Rétif

D’après Wikipedia, c’est un « thriller financier ». Je ne connaissais pas le terme que je trouve en effet bien adapté au film. Voici les grandes lignes de l’intrigue données par le site : « Lorsque le président de la première banque européenne Phenix est victime des premiers symptômes d'un cancer, son jeune protégé, Marc Tourneuil, est propulsé à la tête de la banque. Dirigeant peu scrupuleux et avide d'argent, il veut avant tout profiter de cette nouvelle vie mais se retrouve confronté à l'offensive d'un fonds spéculatif américain prêt à tout pour rentabiliser son investissement. »

C’est Gad Elmaleh qui joue Marc Tourneuil. Bien que l’intrigue s’y prête, je l’ai trouvé assez obscur dans sa manière d’interpréter le personnage. Peut-être parce que la morale de Tourneuil est douteuse ? Toujours est-il que j’ai partagé sa sensation d'ivresse en voyant son ascension dans le nid de vipères qu’est son entreprise, tentant de manoeuvrer les uns contre les autres autant de protagonistes qui le voient eux aussi comme un pion à sacrifier sur l’autel de leurs ambitions personnelles.
Si le capitalisme à la française dans lequel il évolue au début est brutal et détestable, il semble bien angélique comparé au « capitalisme de cow-boys » auquel Tourneuil est bientôt confronté.

Le film a reçu de nombreuses critiques négatives. Je le trouve cependant bon à plusieurs niveaux. D’abord pour la sensation d’asphyxie qu’il m’a inspirée face à la suite d’abjections perpétrées par la boîte américaine. Cette succession de coups bas semble être représentative du monde des affaires d’aujourd’hui peuplé de fonds d'investissements aussi prodigieusement puissants que dépourvus de toute considération morale (je pense à « Lone Star » qui avait acheté une des rues principales de Marseille dans les années 2005 – ou à « BlackRock », dénoncé comme un des artisans principaux des attaques contre le régime des retraites français). Chapeau bas donc à Costa-Gavras, qui dresse un tableau réaliste et passionnant : le rythme est constant et la tension prend au ventre.

L’autre point que je trouve marquant et réussi, c’est d’être obligé de suivre un personnage principal qui a une trempe de « pourri » : vénal, manipulateur et opportuniste. Il n’y a rien de manichéen ici, comme dans les westerns de Sergio Leone, où les « bons » savent aussi être des salopards. Je trouve ça intéressant de vibrer avec lui, quitte à l’accompagner dans ses errances : le voir poursuivre aux quatre coins du monde une femme fatale qui est feu follet sans relief (incarnant l’addiction au luxe et aux sensations fortes, l’oisiveté et le succès facile de la beauté d’une femme-objet) et se jouer d’une femme aussi brillante que jolie (incarnant elle la modestie, le travail qui porte ses fruits et une beauté intègre), cette dernière étant une des rares respirations dans un univers basé sur la corruption et l’hypocrisie.

Publié dans Cinéma, Capitalisme

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